« Son père lui avait dit qu’il était libre de faire comme il voulait, mais que la vie était jalonnée de décisions difficiles. Et que ceux qui faisaient les mauvais choix trop tôt avaient tout le temps de regretter par la suite. »

Un thriller qui renouvelle les codes
Depuis quelques temps, vous avez dû le remarquer, j’ai ralenti ma consommation de thrillers. Moi qui dévorais ce genre avec avidité, je me surprends à les repousser, à chercher d’autres univers plus lumineux, plus apaisés. Peut-être est-ce une question de cycles de lecture, peut-être simplement un besoin de respiration. Mais lorsque j’ai découvert Tous des animaux de Morgan Greene, j’ai senti cette petite étincelle de curiosité renaître.
Pourquoi ce roman, alors que je me détourne du genre ? Parce qu’il ose quelque chose de rare : dès les premières pages, nous connaissons la victime et nous connaissons les coupables. Alors, quel suspense reste-t-il à maintenir ? C’est là que réside l’originalité de ce livre : il ne nous manque pas le qui, mais le pourquoi.
Savage Ridge : une ville qui enferme
Nous sommes à Savage Ridge, petite ville de 5 000 habitants, rongée par les secrets et sous l’influence écrasante de la famille Saint John. Dix ans auparavant, trois adolescents, Emmy, Nicholas et Peter ont tué Sammy Saint John. Le corps n’a jamais été retrouvé, le dossier a été classé, personne n’a été inculpé et chacun a quitté la ville, pensant tourner la page.
Sauf qu’on ne fuit jamais vraiment Savage Ridge. Dix ans plus tard, les trois anciens camarades y reviennent, forcés de confronter leur passé. Une détective, engagée par la famille Saint John, rouvre les plaies et resserre l’étau autour d’eux.
La ville elle-même devient un personnage : étouffante, sombre, chargée de rancunes et de silences. Elle incarne le poids du passé que nul ne peut fuir.
Ce qui m’a immédiatement séduite, c’est la construction du roman. Morgan Greene alterne, entre autre, deux voix et deux focalisations :
- Nicholas Pips, qui parle à la première personne, nous plongeant directement dans sa conscience, ses émotions, ses failles. On est au plus près de sa culpabilité, de ses souvenirs et de ses contradictions.
- Sloane Yo, enquêtrice déterminée et perspicace, apparaît dans des chapitres narrés à la troisième personne. Ce regard extérieur crée un contrepoint méthodique, presque chirurgical, face à l’intimité troublée de Nicholas et de ses amis.
Cette alternance donne au roman un rythme soutenu et une tension constante. On avance comme en apnée, pris entre ce qu’on sait déjà et ce qu’il nous reste à découvrir.
Le suspense sans le mystère ?
Le grand défi de ce thriller est de captiver malgré l’absence de mystère sur l’identité des coupables. Et c’est là que réside la réussite de Morgan Greene : il transforme son intrigue en une enquête sur le mobile. Pourquoi ces adolescents ont-ils tué ? Qu’est-ce qui les liait réellement à Sammy ? Et que cache encore cette petite communauté où chacun semble avoir quelque chose à perdre ?
Même avec toutes les cartes en main, la victime, les meurtriers, les circonstances générales, le lecteur ne cesse de tourner les pages. Parce qu’il reste une question brûlante : qu’est-ce qui a vraiment déclenché le drame ?
Et lorsque le voile se lève enfin, dans un dernier coup de théâtre, la réponse surprend autant qu’elle éclaire.
Les bonnes et les moins bonnes raisons de lire Tous des animaux :
Les bonnes raisons :
- Une construction narrative originale et prenante, qui renouvelle le genre.
- Une plume fluide et haletante, qui maintient l’attention sans relâche.
- Des personnages complexes, dotés d’une réelle profondeur psychologique.
- Une tension qui repose non pas sur l’identité du coupable, mais sur la quête du mobile.
- Une atmosphère oppressante où la ville devient un personnage à part entière.
Les petites réserves possibles :
- Si vous attendez un thriller classique centré sur le whodunit, vous pourriez être dérouté.
- Le suspense se construit plus dans l’attente que dans l’action brute, ce qui ne conviendra pas à tous les lecteurs.
- Ce n’est pas un roman qui m’aura bouleversée au point de devenir un coup de cœur, malgré ses qualités indéniables.

Verdict :
Avec Tous des animaux, Morgan Greene réussit un pari audacieux : nous tenir en haleine tout en révélant d’emblée les coupables. Grâce à une construction narrative ingénieuse, une profondeur psychologique forte et une plume fluide, il nous entraîne dans une plongée sombre au cœur d’une petite ville où rien n’est jamais oublié.
Ce n’est pas un coup de cœur pour moi, mais une lecture qui m’a captivée. Surtout, elle m’a rappelé que le thriller peut encore surprendre, innover et se réinventer. De quoi me donner envie de rouvrir, doucement mais sûrement, les portes de ce genre que j’avais mises de côté.
4ème de couverture :
Trois camarades de classe tuent l’un de leur camarades de classe sans être inquiétés, 10 ans plus tard ils sont de retour dans la ville de Savage Ridge piégés par une enquêtrice…
Savage Ridge, petite ville de 5 000 âmes. À la suite d’une querelle, trois lycéens, Emmy, Nicholas et Peter, tuent l’un de leurs camarades de classe, Sammy Saint John.
Le père de celui-ci, une des plus grosses fortunes de la région, fait tout ce qui est en son pouvoir pour que l’enquête aboutisse. Mais le corps n’étant jamais retrouvé, le dossier est classé. Les trois jeunes gens quittent alors la ville, bien décidés à ne plus jamais y remettre les pieds. Et pourtant, dix ans plus tard, tous les trois sont de retour à Savage Ridge. Piégés par une enquêtrice employée par la famille Saint John, ils doivent maintenant répondre à beaucoup de questions. Alors que l’étau se resserre autour d’eux, il apparaît bientôt que d’autres crimes, plus anciens, entachent cette petite communauté où les secrets sont aussi nombreux que dangereux.
Avec une totale maîtrise de la construction et de l’intrigue, Morgan Greene envoûte littéralement le lecteur avec ce thriller obsédant qui se lit d’une traite, comme en apnée. Suscitant une tension de tous les instants, l’auteur n’y livre la dernière pièce du puzzle que dans un éblouissant coup de théâtre final, totalement inattendu. On tient là, à n’en point douter, un chef d’œuvre du genre.
[…] 4 sur 5. Tous des animaux – Morgan Greene Transylvania – Nicolas Beuglet Funny Story – Emily Henry Le(s) vrai(es) […]
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