« Certaines âmes, lorsqu’elles se rencontrent, redessinent le centre du monde »

Quand l’Histoire devient roman, et le roman devient une traversée de l’humanité
Je dois l’avouer : je ne suis pas, à la base, une grande lectrice de romans historiques. Les récits d’époques lointaines, les batailles et les intrigues politiques me laissent souvent à distance. Et pourtant, depuis que j’ai ouvert Paradis perdus, le premier tome de la saga monumentale La Traversée des temps, d’Éric-Emmanuel Schmitt, je suis totalement conquise.
Avec Les Deux Royaumes, cinquième tome de cette aventure littéraire hors du commun, l’auteur prouve une fois de plus qu’il n’est pas seulement un romancier brillant, mais aussi un conteur habité, un philosophe et un témoin émerveillé de l’humanité.
Je referme ce livre éblouie par l’érudition, la beauté du style, la profondeur du propos et la manière dont chaque page fait résonner notre monde contemporain.
Une saga historique, spirituelle et profondément humaine
La Traversée des temps n’est pas une simple fresque historique. C’est un projet littéraire et philosophique d’une ampleur rare : raconter l’histoire de l’humanité à travers une seule vie, celle de Noam, éternel témoin des civilisations.
Chaque tome explore une période fondatrice :
- Paradis perdus : le Néolithique et le Déluge
- La Porte du ciel : Babel et la Mésopotamie
- Soleil sombre : l’Égypte pharaonique et Moïse
- La Lumière du bonheur : la Grèce du IVe siècle avant J.-C.
- Les Deux Royaumes : la Gaule et Rome à la naissance du christianisme
C’est une expérience de lecture unique. Schmitt fait dialoguer les siècles, mêle la fiction et la connaissance, transforme l’Histoire en aventure humaine. Il parvient à ce miracle : instruire sans jamais ennuyer.
À travers les yeux de Noam, il interroge la condition humaine, la soif de pouvoir, la quête spirituelle, la complexité des civilisations. Et il nous rappelle que, malgré les millénaires, nos interrogations demeurent les mêmes.
Les bonnes raisons de lire Les Deux Royaumes :
- Pour la beauté de la langue :
La plume d’Éric-Emmanuel Schmitt est un enchantement. Chaque phrase semble ciselée avec patience et respect du verbe. Il manie la langue française avec une élégance rare, alliant précision, musicalité et richesse lexicale. Il ose le subjonctif passé, et ce n’est pas anodin : il rend à la langue sa noblesse. - Pour la richesse historique et la clarté du propos :
L’auteur nous plonge dans les croyances celtes, les traditions druidiques, les luttes politiques de Rome, la naissance du christianisme. Le travail de recherche est colossal, mais jamais pesant. On apprend sans effort, comme si l’Histoire se racontait d’elle-même. - Pour la portée universelle du roman :
Sous la trame historique, Schmitt tisse une réflexion très contemporaine. Le royaume terrestre, celui de la puissance et de la domination, fait étrangement écho à notre monde moderne. Le royaume céleste, celui de la fraternité et de la foi, demeure une utopie qui interroge nos valeurs. - Pour les personnages devenus familiers :
Noam, Noura, Tibor… après cinq tomes, ce ne sont plus des personnages, mais des compagnons. On s’y attache profondément. On suit leurs doutes, leurs espérances, leurs failles. Ils traversent les âges, mais aussi les émotions universelles : l’amour, la perte, la foi, la désillusion. - Pour la démesure et la cohérence du projet littéraire :
Raconter toute l’histoire de l’humanité sous forme de roman : il fallait oser. Éric-Emmanuel Schmitt relève ce défi avec brio. Chaque volume prouve l’ampleur de sa vision et la rigueur de ses recherches. Son érudition, immense, se fond dans le récit avec une fluidité admirable.
Une fin brillante et pleine de promesses
La conclusion Des Deux Royaumes est à la hauteur du voyage : brillante, haletante, profondément signifiante. Elle boucle certains fils narratifs tout en ouvrant de nouvelles perspectives pour la suite de la saga.
C’est une fin vertigineuse, qui donne furieusement envie de poursuivre cette traversée.
Je referme ce cinquième tome avec un profond sentiment d’admiration. Admiration pour l’intelligence de l’auteur, pour la beauté de son écriture, pour sa capacité à allier savoir et émotion. Il nous offre une œuvre à la fois monumentale et accessible, érudite et humaine.

En bref :
Les Deux Royaumes est un roman foisonnant, d’une richesse exceptionnelle. À travers la Gaule, Rome et Jérusalem, Éric-Emmanuel Schmitt poursuit son exploration magistrale des âges de l’humanité et des questionnements éternels de l’homme.
C’est un livre érudit, lumineux, mais aussi profondément incarné.
On en ressort plus riche, plus curieux, et un peu nostalgique aussi : celle de devoir attendre la suite.
4ème de couverture :
La cueillette du gui, un élixir de jouvence cent pour cent gaulois, une assemblée de druides à l’ombre des grands chênes… Le fabuleux monde celtique n’en finit pas d’émerveiller Noam lorsqu’il débarque en Gaule. Mais bientôt l’irruption d’envahisseurs d’un genre nouveau, les Romains, vient bouleverser l’équilibre des forces.
Du célèbre Spartacus, figure de révolte et d’espérance qui défie la République romaine, à l’empereur Auguste et son épouse Livie, nouveaux maîtres de Rome au prix de morts suspectes et de crimes irrésolus, Noam assiste, perplexe, à l’apparition d’une concentration de pouvoir sans limites.
Très loin de là, à Jérusalem, un certain Jésus tient un tout autre discours que celui de Rome. Prônant l’égalité entre tous les hommes, sa parole ouvre un horizon radicalement neuf et suscite un espoir infini. Deux « royaumes » se dessinent : l’un terrestre et hégémonique, l’autre céleste et accessible à tous. Entre ces deux conceptions du monde, Noam devra-t-il choisir ?
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