Solitudes – Niko Tackian

« Et puis les lettres continuaient à danser devant ses yeux: vérité. Tout se résumait à ça désormais. »

Note : 4.5 sur 5.
Date de parution: 06/01/2021

Le massif du Vercors est un endroit aussi sauvage que majestueux. C’est là qu’a trouvé refuge Elie Martins, garde nature après être considéré comme un miraculé suite à une balle dans la tête qui ne l’a pas tuée. Depuis, Elie est amnésique, son passé s’est complétement effacé, il trouve son équilibre auprès de la nature et de ses rares amis bergers. Suite à un signalement, il part à la recherche d’un loup alors qu’une tempête de neige s’est installée. Des traces ensanglantée l’intriguent et le mènent au pied d’un très grand arbre isolé. En levant la tête, Elie découvre le cadavre d’une femme nue pendu sur une branche avec le dos lacéré par une inscription étrange qui réveille en lui un début de réminiscence. Ce corps exposé en plein cœur de sa montagne n’est pas un hasard, il est persuadé qu’il est là pour lui. C’est Nina, lieutenant fraichement débarquée de Paris à Grenoble qui prend l’enquête en main. Elle ne sait pas en qui elle peut faire confiance et tente de se fier à son instinct. Elie est-il une victime ou cache-t-il quelque chose?

C’est toujours avec un grand plaisir que j’ouvre un Niko Tackian mais là, un thriller d’un auteur que j’adore qui emprunte un décor qui m’est familier c’est d’autant plus tentant ! Si vous n’avez pas encore eu la chance de venir visiter les montagnes du Vercors et ses paysages à couper le souffle, ne vous inquiétez pas, Niko est là pour vous les décrire comme si vous y étiez, les représentations sont imagées et scénarisées, on va même jusqu’à ressentir le froid polaire de la tempête. C’est magnifiquement décrit.

A travers ce thriller en One-shot, qui a été écrit durant le premier confinement, l’auteur nous fait prendre un bon bol d’air frais et nous offre des personnages énigmatiques et très bien construits, à l’image d’Avalanche Hôtel, son précédent roman. La nature et la montagne sont d’ailleurs des personnages à part entière. La spiritualité est présente, à travers le chamanisme et la capacité à comprendre la nature, cette histoire est je trouve l’une des plus fortes de l’auteur. On y retrouve encore la notion de mémoire, de souvenirs, de passé et de racines. Un univers déjà exploré dans de précédents romans, comme une forme de signature. A travers son titre, Solitudes (notez le pluriel il est important), l’histoire principale est parfaitement résumée. Vous avez beau avoir une belle enquête, dont on ne devine pas du tout la fin avant la fin, ouf, ce qui m’a le plus marqué reste tout de même ce sentiment de solitude qui est omniprésent durant toute la lecture. Que ce soit à travers la vie des personnages (Elie, Nina, Piotr, Réda, Jacques etc…), les paysages ou l’écho que cela peut provoquer en nous (surtout en ce moment) tel un miroir grossissant et bien finalement, cette lecture est si prenante qu’on se sent indéniablement moins seul. Toujours riche en sensibilité, l’auteur nous offre un huit clos en plein air, où vos traces sont effacées par la neige aussi vite qu’elles sont apparues, exactement comme l’intrigue qui restera dans le flou jusqu’à la dernière page. La quête de vérité à tout prix.

Grenoble est décrite avec son surnom de little Chicago, ça m’a fait sourire. J’y vis depuis plus de 10 ans et même si j’admets que le trafic de drogue y tient une place importante, on est tout de même loin d’une ville où l’insécurité domine. Désolée, j’avais besoin de le dire! En tout cas, en voulant s’évader pendant l’écriture de son roman, Niko Tackian nous offre à nous, lecteurs, un voyage des plus bienvenue qui nous permet de quitter durant quelques heures la morosité de notre situation sanitaire actuelle. Malgré le couvre-feu qui nous oblige à rester chez nous dès 18h, j’ai eu le sentiment d’être complétement déconnectée de la réalité dans laquelle nous sommes. J’ai pris l’air, j’ai voyagé (oui, oui même si c’est seulement à 2h de route de chez moi), et rien que pour ça je remercie l’auteur. Les chapitres courts rythment à merveille l’histoire et nous piègent complétement dans le roman. Page-turner efficace et glaçant.

A travers Solitudes, vous allez vivre une expérience des plus plaisantes en ce moment, un véritable puzzle sensoriel vertigineux qui saura vous tenir en haleine mais surtout vous procurera des émotions que l’on ne retrouve pas ailleurs. Vous entendrez la neige craquer sous vos pieds immobiles, vous sentirez le froid vous fouetter le visage pourtant protégé chez vous, vous imaginerez une immensité blanche aussi inhospitalière qu’attirante. C’est tout ça qui fait de ce roman, un très grand roman !

« Il devait être à peine 7 heures du matin et la neige commençait à prendre cette couleur verte des premières heures du jour. La brume qui n’avait pas disparu semblait naviguer par couches si bien qu’on distinguait parfois la lisière noire des bois. » p159

Vous l’aurez donc compris, Solitudes a pour ma part pleinement satisfait mon appétit d’ogre de lectrice. Je sais que j’en garderai un souvenir fort et puissant et je vous invite sincèrement à venir découvrir le Vercors et à vous plonger dans votre propre solitude à travers les pages de ce roman à ne pas manquer.

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